Rompant avec les méthodes cho3bistes utilisées par d’autres partis d’opposition, le meeting du FDTL s’est voulu moins pompeux : exit les drapeaux électoraux, et les bus chasseurs d’ados, tribune d’honneur : tout le monde dans la même salle.
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Commencé en retard, le meeting est ouvert par un des membres du parti qui nous invite à réciter la Fatiha (الفاتحة) à la mémoire des martyrs de la révolution après une brève introduction.
Mustapha Ben Jaafar, secrétaire général du parti, prend ensuite la parole pour clarifier la position politique de son parti quant à la situation du pays, en derja, sans langue de bois.
Vous trouverez en fin d’article les liens de téléchargement des extraits audio des différentes interventions.
Gouvernement de transition, non de réforme
Après les habituelles louanges à la révolution et au peuple tunisien, il revient essentiellement sur la position du FDTL par rapport au gouvernement actuel de transition, et réitère ce qu’il avait réclamé lors de son intervention sur Mosaïque FM : le gouvernement de transition, selon lui, ne doit s’occuper que des affaires courantes, et n’avoir pour autre tâche que de réussir la transition démocratique. En conséquence, ce corps exécutif n’est pas habilité selon lui à mener des réformes.
Nous relevons ici une contradiction dans la position du FDTL : comment veut-il que le gouvernement de transition ne mène pas de réformes, s’il veut réussir une transition démocratique? Cette transition ne pourra se faire que par une réforme des textes de lois, et notamment de la constitution.
Grèves et manifestations seuls outils de contestation face à l’aveuglement du pouvoir. Solution : une assemblée pour la sauvegarde de la révolution
M. Ben Jaafer a aussi appelé les citoyens à la vigilance quant à la non confiscation des fruits de la révolution du peuple par l’élite politique qui gouvernait le pays en temps de dictature, et qui le gouverne encore. En rappelant les évènements de la Kasbah, il a trouvé malheureux qu’à chaque fois que le peuple exprimait son mécontentement, le gouvernement ne semblait l’écouter que lorsque les gouvernés recouraient à l’ultime moyen de pression : grèves et manifestations. Aussi a-t-il prévenu que si les acquis de la révolution étaient amenés à être en danger, son mouvement s’en retrouverait contraint à utiliser ces derniers recours, c’est-à-dire la grève et les manifestations, l’aveuglement du gouvernement face aux réclamations du peuple en étant la cause.
Après avoir souligné le danger qui réside en la non existence d’un contre pouvoir fort au gouvernement actuel, si ce n’est la contestation de la rue, M. Ben Jaafer a appelé à la création d’une assemblée de sauvegarde de la révolution, dont le rôle serait d’empêcher les dérapages anti-démocratiques du pouvoir en place.
Bien, mais de quelles prérogatives disposera cette assemblée? Quelles seront les personnes aptes à siéger dans cette assemblée ? Quelle en sera la crédibilité si elle n’est pas élue par le peuple ? Comment s’inscrirait-elle dans le cadre législatif actuel ? Il est une chose de proposer un beau concept, il en est une autre de l’expliciter en termes pratiques.
Oui à des institutions démocratiques fortes, non aux sauveurs miraculeux
Concernant l’avenir du système politique tunisien, M. Ben Jaafer a affirmé que le peuple ne voulait plus de « sauveurs miraculeux », mais d’institutions capables d’assurer une démocratie solide.
C’est bien beau, mais l’urgence de la situation appelle ce genre de propositions à être plus fournie : il faudrait que le FDTL étaye ses propositions en terme de système politique : de quelles institutions parle-t-on ici ? Faudrait-il en créer de nouvelles ? Quelles prérogatives ? Comment y concrétiser une légitimité populaire ?
Bourgeois, ne vous inquiétez pas!
Le SG du FDTL finit par un éloge des entrepreneurs tunisiens « patriotes », qui selon lui ont contribué au développement du pays. Est-ce pour rassurer l’électorat bourgeois en se démarquant de l’extrême gauche ? On y voit un signal clair au patronat tunisien pour le rassurer quant à ses privilèges, et un positionnement de la politique économique du FDTL dans le spectre politique. Ce positionnement se confirme par le rappel de la solidarité du PS (pourquoi le PS seulement ? nous y reviendrons dans un prochain article) à la révolution tunisienne.
Témoignages de jeunes de Sidi Bouzid et de Gasrine
La parole est ensuite cédée à l’un des jeunes grévistes de la Kasbah, originaire de Sidi Bouzid et militant des jeunes du FDTL. Après avoir repris l’incitation à la vigilance, il appelle les jeunes tunisiens à se cultiver politiquement à travers des livres et des revues/journaux, car considère-t-il, le seul rempart contre une nouvelle dictature est la conscience politique du peuple.
Meeting FDTL Témoignage Sidi Bouzid Part1 echGolt.com
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Meeting FDTL Témoignage Sidi Bouzid Part2 echGolt.com
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Un enseignant de 7ay Ezzohour d’El Gasrine prend ensuite la parole pour relater sa propre expérience lors de la révolution, témoignant encore une fois qu’il ne faut pas réduire cette révolution à la seule contestation sociale, mais qu’elle recouvre surtout une aspiration à la dignité et à la liberté. Aussi a-t-il annoncé que même si le FDTL bénéficiait d’un soutien relatif de Gasrine, cette région sera la première opposante au régime si le FDTL prenait le pouvoir et oubliait les revendications de développement régional équitable. Il a menacé qu’il sera de même pour tout élu des futures élections: s’il venait à oublier ces revendications, il aurait pour opposants de première ligne les régions défavorisées.
Meeting FDTL: Témoignage enseignant Gasrine echGolt.com
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Soutien d’Ahmed Mestiri, père du MDS, au FDTL
Après un interlude musical avec certains musiciens du groupe d’El Ba7th el Mousi9i, connu pour son engagement politique, M. Ahmed Mestiri, ex collaborateur puis opposant de Bourguiba, nous fait la surprise de prendre la parole et de rappeler encore une fois à la vigilance. Il qualifie ce que nous vivons aujourd’hui de seconde indépendance. M. Mestiri qualifie le FDTL de véritable héritier politique du MDS qu’il avait fondé en 1978, et appelle les sympathisants du MDS à voter pour le FDTL.
Meeting FDTL Intervention d’Ahmed Mestiri echGolt.com
envoyé par echGolt. – L’info video en direct.
Si Ben Jaafar, au talent orateur certain, a réussi à décrire la position politique du FDTL lors du meeting, nous laissant cependant sur notre faim quant au programme politique, économique et social de son mouvement. Aussi, nous nous devons de relever une tendance à la généralisation, qui selon nous est une erreur. Lors de son discours, le SG du FDTL parlait au nom du peuple. Tout le peuple s’est révolté, soit. Mais ce n’est pas tout le peuple qui a demandé le départ du premier gouvernement de transition, ni du deuxième. En l’absence de sondages fiables, nul ne peut se targuer de parler au nom du peuple.
Rafik Rezine
en collaboration avec Yasmin Bizid
Intervention Mustapha Ben Jaafer:
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Témoignage d’un gréviste de Sidi Bouzid:
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Témoignage d’un enseignant de Gasrine:
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Intervention Ahmed Mestiri:
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6 replies on “Meeting FDTL 5 Février: Nous sommes restés sur notre faim”
” comment veut-il que le gouvernement de transition ne mène pas de réformes, s’il veut réussir une transition démocratique?” bien dit Rafik .. la pression du peuple sur le gouvernement doit continuer pour assurer une transition démocratique !!!
Aucun commentaire sur la fétha ? toi qui avais été gêné par quelques signes religieux lors du meeting du PDP.
Sinon moi je pense que MBJ se retrouve dans une mauvaise position maintenant et il essaie de gagner des points par-ci par-la. Le FDTL était en alliance avec Ettajdid depuis plusieurs année, et quand il a décidé de rompre cette alliance et de miser plutot sur l’UGTT, il a perdu ses voies potentiels chez les démocrates. Il se paie même le luxe de les traiter indirectement de “traitres de la révolution”. Il était parmi les plus modérés de l’opposition maintenant il se veut plus révolutionnaire que le PCOT et Cie. Il exploite juste un créneau. Pitoyable
Marwen, la lecture de la Fatiha à la mémoire des martyrs est une chose, des poum poum girls en hijeb en est une autre.
Concernant Ettahdid, qu’est ce que tu aurais fait? Ettajdid a collaboré avec Ben Ali le 13 janvier. Le FDTL ne l’a pas fait.
Moi deja j’aurais évité de les traiter de traitres. mayjich. c’est pas classe…
qu’est ce que tu appelles collaborer avec ben ali le 13 ? Si c’est saluer les mesures prises bla bla alors je ne leur en veux pas vraiment. Le FDTL ne l’a peut etre pas fait, mais il n’a pas fait grand chose de toutes les manières…
Je pense que le FDTL a bien fait de parler seulement de sa position politique vis à vis la Révolution et le gvt actuel. Je trouve çeci bien placé puisque, à mon avis ce n’est pas le moment pour étaler son prg politique et socioéconomique. Je pense qu’en ce moment la plupart des gens focalisent sur le fragile équilibre qui caractérise la scène politique et sécuritaire du pays, ainsi que sur le débat. Le PDP s’est fait piégé en se lançant ‘bètement’ dans un semblant de compagne électorale colorée, ce qui lui a attiré pas mal de foudres.
J’ai l’impression que Mostfa Ben Jaafar a essayé de récupérer une certaine sympathie politique en critiquant rigidement et sulfureusement le gvt de transition, surtout les évènements de la Kasbah. Bon ceci relève du jeu politique c normal, mais son discours était plutot cohérent.
@Marwen B: la lecture de la fatiha fait partie de notre culture tunisienne, la lire à la mémoire des morts c exactement équivalent à une minute de silence dans la culture occidentale.